Il n’a pas donné congé, n’a pas rendu les clés, ne répond pas au téléphone : le locataire semble parti et, cerise sur le gâteau, ne vous paye plus les loyers et charges mensuels. Que dit la loi ?
Pour commencer, la procédure que j’aborde ici s’applique exclusivement aux contrats de location régis par la loi du 06 juillet 1989 (hors bail meublé, bail professionnel et bail commercial). Sachez qu’il est INTERDIT de vérifier par vous-même dans le logement si le locataire est parti, s’il a laissé des affaires sur place par exemple… Pour vous passer l’envie, je vous cite l’article 226-4 du Code pénal : “L’introduction dans le domicile d’autrui à l’aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.” En revanche, soyez attentifs aux indices de départ : la boîte aux lettres déborde-t-elle ? Les consommations des compteurs énergétiques, s’ils sont accessibles depuis les communs, ont-elles bougé ? Les voisins l’entendent-ils ?
Vous pourriez toujours solliciter par requête, adressée au tribunal judiciaire du lieu de situation de l’immeuble loué, l’autorisation de rentrer dans le logement “pour voir”, mais ça n’a aucune utilité. Ici, on parle entre personnes qui cherchent des solutions efficaces.
Demander (et obtenir) ainsi une ordonnance sur requête est gratuit, OK. Mais comment prouver ce que vous y avez vu ? Le juge ne laissera pas le propriétaire rentrer s’il n’a pas une motivation sérieuse (fenêtre ouverte en plein hiver, dégât des eaux, odeur suspecte…).Surtout, il vous accordera cette autorisation d’autant plus “volontiers” qu’un huissier de justice vous accompagne pour dresser procès-verbal de constat, en présence de la police ou de la gendarmerie et d’un serrurier (oui, je vous rappelle que le double des clés que vous avez gardé, c’est aussi interdit !), le tout à vos frais.
Coût : comptez autour de 500,00 Euros, selon le coût du serrurier, les honoraires de l’huissier de justice, l’indemnisation de la police (19,80 Euros).
Résultat : néant.
Sur ce blog, on veut des solutions efficaces et c’est pour ça que je me fais un plaisir de vous expliquer la procédure de reprise des locaux abandonnés, créée par une loi du 22 décembre 2010 (loi “Béteille”) et précisée par le décret du 10 août 2011. Allez voir rapidement un huissier (ou appelez une étude proche du bien loué puis échangez par mail si cela vous convient) à qui vous remettrez le bail et une ou deux attestations de voisins confirmant qu’ils n’ont plus vu le locataire depuis telle date, ou qu’ils l’ont vu déménager. Ce sera un argument de plus pour convaincre le juge de la véracité des faits.
Avertissement : cette procédure, qui se veut pratique et rapide, pourra être remise en cause à tout moment si le locataire réapparaît ! A garder en tête jusqu’à la fin de la procédure.
Mise en demeure de justifier de l’occupation du logement
1. La loi indique que lorsque des éléments laissent supposer que le logement est abandonné par ses occupants, le bailleur peut mettre en demeure le locataire de justifier qu’il occupe le logement.
Les 2/3 de l’article restent à débloquer ! Laissez simplement votre prénom et votre email pour déverrouiller instantanément le reste de cet article, et recevez également votre livre gratuit « Victime d’un impayé, LA solution rapide et efficace pour retrouver votre argent » 2. Cette mise en demeure, faite par acte d’huissier de justice, peut être jointe au commandement de payer les loyers, de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, ou d’avoir à justifier d’une assurance contre les risques locatifs, de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989. Pour mon article sur le commandement : cliquez ici. Je vous recommande de demander à l’huissier de joindre effectivement cette mise en demeure à son acte de commandement, c’est le même prix et vous pouvez toujours résilier le bail sur la base des loyers impayés si le locataire justifie qu’il occupe le logement ! Si l’huissier ne trouve pas le locataire, que ni vous ni lui ne connaissez son lieu de travail, la loi impose à l’huissier de faire des recherches, d’en rendre compte dans un procès-verbal. Il envoie l’acte par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au dernier domicile connu du locataire, souvent le bien qui vous appartient. Même si le locataire ne cherche pas la LRAR, cela vaut signification et fait courir le délai d’un mois. Le locataire qui veut justifier de l’occupation du logement adresse un écrit à l’huissier. En pratique, je n’en ai vu que deux en justifier (sur une centaine de procédures). Photo ThoroughlyReviewed 3. Si le locataire n’a pas donné de nouvelles, auprès de vous ou de l’huissier, l’huissier est autorisé à rentrer dans le logement avec le maire de la commune, d’un conseiller ou fonctionnaire municipal (illusoire dans les grandes villes), d’une autorité de police ou de gendarmerie, requis pour assister au déroulement des opérations ou, à défaut, de deux témoins majeurs qui ne sont au service ni du créancier ni de l’huissier (article L. 142-1 du Code des procédures civiles d’exécution). Vous n’avez pas le droit d’être présent (principe général de l’exécution forcée) mais vous pouvez demander à l’huissier de vous rendre compte en vous téléphonant par exemple après l’intervention. 4. Si, sur place, l’huissier rencontre le locataire qui confirme qu’il vit toujours là : l’huissier refermera aussitôt la porte ! Si, s’appuyant sur des indices factuels, il pense que le locataire est parti, il dresse un constat d’abandon du logement. Il mentionnera que le siphon est sec, que la plante est desséchée, que le réfrigérateur est vide, qu’aucun papier d’identité n’a été trouvé, qu’il n’y a pas de lit… A chaque cas ses spécificités ! J’ai déjà eu un cas dans lequel la locataire n’avait plus d’affaires sur place, avait cherché le recommandé (la mise en demeure) sans toutefois justifier qu’elle occupait le logement, et elle a contesté en toute fin de procédure la décision ordonnant la résiliation du bail ! Encore une fois, cette procédure ne vous garantit pas à 100% de retrouver votre bien en 3 mois mais elle reste avantageuse dans une majorité de situations ! 5. Votre huissier de justice préféré, ou votre avocat, adressent au juge du tribunal judiciaire une demande pour que le juge ordonne la résiliation du bail, vous autorise à évacuer les meubles (ou vendre aux enchères ceux qui ont une valeur), mais aussi la condamnation du locataire au paiement des loyers et charges. Si l’huissier avait trouvé des papiers d’identité, il les garde deux ans à l’étude sous enveloppe scellée. A cette demande adressée au juge, l’huissier joint le contrat de bail, la mise en demeure, son procès-verbal de constat d’abandon, un décompte fait par vos soins. Peut-être pas utile dans l’immédiat me direz-vous, mais la décision est valable dix ans donc si vous retrouvez le locataire, même dans 4 ans, vous serez bien content de retrouver votre argent. 6. Le tribunal peut rejeter la demande, cette ordonnance de rejet ne peut alors pas être contestée : le propriétaire devra assigner son locataire. Mieux vaut prendre contact avec un avocat en lui montrant les pièces du dossier, y compris les pièces de cette procédure. L’avocat pourra solliciter, en plus des demandes ci-dessus, des dommages et intérêts pour le préjudice que vous subissez. Au juge d’accéder ou non à cette demande ! En pratique, je n’ai jamais vu une seule ordonnance de rejet, sans doute parce que les huissiers pour lesquels j’ai travaillé ont réuni suffisamment d’éléments dans leur procès-verbal pour convaincre le juge de l’abandon effectif. Dans ce cas, le juge rend une ordonnance résiliant le bail. 7. Dans les deux mois de sa date, l’ordonnance est signifiée par acte d’huissier au locataire. Même cas qu’au-dessus, si on ignore son adresse, cela ne fait pas obstacle à votre droit de récupérer votre bien. Le locataire a un mois pour former opposition auprès du tribunal qui a rendu la décision. S’il conteste la décision, le tribunal vous convoque avec le locataire et vous ne pourrez reprendre le logement que si la décision qui sera rendue, qui se substitue en fait à la première, confirme que le bail est résilié. Pendant tout ce temps, le logement reste en “stand-by”, occupé ou non par le locataire. Que faire si le locataire vient réclamer les clés ? La Chambre Nationale nous recommande de rendre les clés, car le délai du recours et le fait que le locataire exerce son recours, sont suspensifs de l’exécution de la décision résiliant le bail. Vous me suivez ? C’est parfaitement logique juridiquement, mais une personne “correcte” comme vous se dira “c’est quand-même étonnant, il ne s’est pas manifesté depuis des mois et ce malgré la mise en demeure !” Vous pourriez avoir l’impression que la loi protège un locataire “fourbe”. C’est la différence entre le raisonnement du juriste (de la loi) et du propriétaire (qui a un besoin vital de retrouver son bien). 9. S’il ne conteste pas, l’ordonnance du juge produit les effets d’un jugement passé en force de chose jugée : vous pourrez récupérer votre bien après une dernière intervention de l’huissier. Photo Peaches&Cream 10. Une fois l’ordonnance passée en force de chose jugée, c’est à dire après un mois à compter de l’acte de signification de la décision par l’huissier, vous pouvez ENFIN reprendre votre bien (alléluia !) suivant une procédure d’expulsion simplifiée, qui permet de débarrasser les meubles sur le sort desquels le juge a statué. 11. L’huissier dresse un procès-verbal de reprise des lieux qu’il signifie au locataire ayant abandonné le logement (à sa nouvelle adresse ou à la dernière adresse connue) : article R.451-2 du Code des procédures civiles d’exécution. 12. Vous avez enfin vos clés, vous vous êtes allégé de la facture de l’huissier ou de l’avocat, de celle du serrurier, vous pouvez maintenant concrètement reprendre le bien, le rafraîchir, débarrasser les objets et le remettre en location. Photo Hamad AL-Mohannna 13. Bon à savoir : la loi précise bien qu’à l’occasion des opérations de reprise des locaux, s’il s’avère que ceux-ci sont à nouveau occupés par la personne expulsée (ou toute personne de son chef), l’huissier peut procéder à leur expulsion sans avoir à obtenir une décision d’expulsion et sans avoir à délivrer un commandement de quitter les lieux (la signification de la décision ordonnant la reprise des lieux tenant lieu de commandement d’avoir à libérer les locaux). 14. Coût : le coût des actes de l’huissier est tarifé par la loi. Le coût final dépend donc du temps passé sur place par l’huissier et de la facture du serrurier. Au total, il faut compter autour de 1200,00 Euros en province. 15. Résultat : votre bien récupéré en trois à quatre mois (selon les délais du Tribunal pour rendre sa décision, d’expérience plutôt rapide), à condition que le locataire ne conteste pas. Comparé à une procédure d’expulsion classique : MINIMUM un an de gagné ! Et des milliers d’euros économisés. 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Requête en résiliation de bail
Signification de l’ordonnance au locataire
Procès-verbal de reprise des lieux
Bilan de la procédure