Votre bien est mis en location, vous pensiez avoir trouvé un locataire fiable mais en réalité, il vous paye le loyer en retard ou ne vous paye plus du tout. Il ne répond pas à vos appels et ne vous ouvre pas la porte. Ne restez pas démunis face à son comportement et agissez au plus tôt en suivant ce guide !
Pour rester la plus concrète possible, une question simple : votre locataire est-il encore dans les lieux ou pas ?
Plusieurs moyens légaux de le savoir : interrogez les voisins (l’avez-vous vu récemment ? Quand pour la dernière fois?) et faites-vous faire une ou deux attestations. Vous apprendrez peut-être qu’il a déménagé la semaine dernière ! Ou bien qu’il est régulièrement vu dans les lieux.
Regardez si sa boîte aux lettres ne déborde pas de courrier (attention, ne pas prendre ce courrier sous peine de poursuites pénales) et est relevée.
Si les compteurs énergétiques sont dans les parties communes, faites un relevé de consommation : si le compteur n’a pas bougé en 2-3 semaines, il y a fort à parier qu’il ait quitté les lieux même si l’on ne peut jamais être sûr à 100% (il est peut-être en voyage ou en vacances, le comble, alors qu’il n’honore même pas son loyer !) Petit rappel évident mais sûrement utile : le propriétaire n’est pas censé détenir un double de la clef du logement !
Si vous êtes dans le cas du locataire qui a abandonné le logement, si le bail entre dans le cadre de la loi du 06 juillet 1989, consultez l’article sur la procédure de reprise des locaux abandonnés en cliquant ici. Hors loi de 1989, rendez-vous au paragraphe “bail sans clause résolutoire”.
Si vous savez que votre locataire indélicat occupe toujours votre bien, il vous faut maintenant vérifier quel bail a été signé : est-ce qu’il contient une clause résolutoire ? Sous ce nom savant, il s’agit simplement d’un paragraphe figurant dans le contrat de bail et qui indique : “A défaut de paiement de tout ou partie du loyer dans un délai de xx mois après un commandement de payer infructueux…” ou “Faute par le locataire de régler les loyers et charges au propriétaire, le bail sera résilié immédiatement et de plein droit…”
S’il n’en contient pas, pas de panique, rendez-vous directement au paragraphe ci-dessous “bail sans clause résolutoire”.
Bail contenant une clause résolutoire
L’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 rappelle que tout contrat de bail prévoit une clause résolutoire.
Vous voulez toucher vos loyers en temps et en heure, c’est évident. Vous pourriez faire vous-même une procédure de recouvrement classique contre le locataire. Mais vu le comportement de celui-ci, il est légitime de vouloir résilier le bail puisqu’il ne respecte pas ses obligations. Dans cette optique de mettre fin à la location, il est obligatoire de passer par un commissaire de justice.
Bon à savoir : si le locataire vous paye mais systématiquement en retard, vous pouvez tout de même vous rendre chez le commissaire de justice. Payer avec retard, c’est également ne pas respecter ses obligations de locataire.
Munissez-vous d’une copie de votre bail, de votre pièce d’identité ou d’un Kbis de votre SCI et d’un décompte détaillant mois par mois les loyers impayés. Ci-dessous un modèle simple que vous pouvez reproduire sur papier libre.
Mois |
Loyer impayé |
Charges impayées |
Janvier 2027 | 360,00 Euros | 55,00 Euros |
Février 2027 | 360,00 Euros | 55,00 Euros |
Total dû au 18 février 2027 : 830,00 Euros
Si vous touchez l’allocation ou aide au logement de votre locataire, vous pouvez présenter le tableau ainsi :
Mois | Loyer | Charges | APL | Solde du |
Janvier 2027 | 360,00 E | 55,00 E | – 120,00 E | 295,00 E |
Février 2027 | 360,00 E | 55,00 E | – 120,00 E | 295,00 E |
Total dû au 18 février 2027 : 590,00 Euros
Bail d’habitation : délai de six semaines pour tout vous régler
Le commissaire de justice va signifier à votre locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail (comme son nom l’indique, cette clause est intégralement reproduite dans l’acte de commissaire de justice), qui laissera six semaines à votre locataire pour s’acquitter de l’intégralité de l’arriéré y compris les frais de commissaire de justice, auprès de vous directement.
C’est vous qui réglez la facture du commissaire de justice, mais vous en demandez remboursement à votre locataire devant le Tribunal si vous devez en arriver jusque-là.
Le commissaire de justice ou son clerc assermenté se rendront sur place rapidement. Donnez toutes informations sur les moyens de joindre votre locataire : “le logement est situé au 2ème étage, porte de droite”, ou “Mon locataire travaille dans telle société”.
En effet, la loi oblige le commissaire de justice à faire le maximum pour le rencontrer en personne, et relater ses diligences dans le procès-verbal de remise de l’acte.
Bien sûr, si votre locataire se cache et ne répond pas aux coups de sonnette du commissaire de justice, ce dernier signifiera finalement par “dépôt à l’étude”: la date du commandement sera donc celle où le commissaire de justice était sur place même s’il n’a pas rencontré le locataire en personne. Si vous aviez pris la sécurité de prendre une personne comme caution, le commissaire de justice portera à sa connaissance les impayés du locataire. Elle prendra peut-être le relais du locataire défaillant (illusoire dans l’immédiat) ou fera peut-être bouger les choses, en demandant au locataire d’arrêter ici l’hémorragie et de vous rendre immédiatement les clés, qui sait ?
D’ailleurs, cliquez ici pour rejoindre mon programme 100% en ligne Etat des Lieux Pro.
En tous les cas, il faudra bien penser que c’est une deuxième personne qui sera tenue de régler la dette, ce qui maximise vos chances d’être payé.
De même, si votre locataire ne justifie pas de l’attestation d’assurance annuelle, cette même procédure s’applique à une exception : il a un mois pour vous en justifier. Vous pouvez utiliser ce moyen pour vous séparer de ce locataire même s’il vous paye ses loyers rubis sur ongle. Normal : au fond, il ne respecte pas son obligation d’user de votre bien en bon père de famille.
A défaut de vous payer sous deux mois tout l’arriéré au centime près, ou de vous justifier dans le délai imparti de son assurance habitation, le bail sera résilié immédiatement et de plein droit. Aux yeux de la loi, le locataire devient “occupant sans droit ni titre”.
Le juge sera tenu de constater que le bail est résilié et ordonnera l’expulsion, la condamnation de l’occupant à vous régler l’arriéré, une indemnité d’occupation etc. Pour connaître le détail des demandes à adresser dans ce cas au tribunal judiciaire du lieu de l’immeuble passé le délai, cliquez ici pour consulter mon article sur le sujet. Vous pouvez aussi vous adresser à un avocat qui pourra vous assister ou vous représenter.
Bail d’habitation meublé : un délai différent ?
Avant la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, la procédure était la même que ci-dessus, à l’exception près que le locataire n’avait qu’un mois pour vous régler l’intégralité de sa dette et des frais. L’article 25-3 de la loi du 6 juillet 1989 précise que l’article 24 de cette même loi (celui qui explique la clause résolutoire du bail) s’applique désormais aux baux meublés. Ainsi, le traitement de l’impayé de loyer du bail meublé a été aligné sur celui du bail non meublé : le délai imparti au locataire pour vous régler, sous peine de résiliation du bail, est de six semaines.
Dans les deux cas de loyers impayés, le commissaire de justice effectuera un signalement à la CCAPEX (Commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives) si le bailleur est une personne physique ou une SCI “de famille” (article 24, I, 4ème paragraphe de la loi du 06 juillet 1989).
Conclusion
Passé le délai (ou un peu avant mais les tribunaux n’aiment pas trop bloquer une date d’audience hypothétique, imaginez si votre locataire régularise sa dette le dernier jour ?), vous (ou votre représentant) solliciterez une date d’audience devant le juge pour obtenir une décision d’expulsion. Dans cet article, mon amie Cécile vous a préparé un schéma récapitulant les délais de procédure pour savoir exactement où vous allez. Le temps, c’est de l’argent, vous avez besoin d’anticiper la durée de la procédure.
Bail sans clause résolutoire
Pour les baux d’habitation, deux cas entrent dans cette catégorie : le bail verbal ou le bail écrit mais qui ne contient pas de clause résolutoire. Que votre locataire soit toujours dans les lieux, ou qu’il ait quitté les lieux (hors baux soumis à la loi du 06 juillet 1989) mais sans ni vous donner congé (ou, au minimum, sans vous laisser d’écrit prouvant son départ) ni rendre les clés, voici la marche à suivre.
La loi vous permet d’agir au fond (procédure classique), ce qui est le contraire de la “procédure accélérée au fond” (ancien référé). En pratique, vous vous présentez au greffe du tribunal judiciaire du lieu de situation de votre immeuble. Pour connaître le tribunal compétent, cliquez ici. Le tribunal est saisi par assignation ou par requête. Si vous choisissez la requête (plus simple, l’avocat n’est pas obligatoire), vous complétez votre identité (et préciser s’il s’agit d’une SCI le cas échéant), celle du locataire (et de son conjoint si vous avez été officiellement informé de leur mariage), en résumant la situation : “Selon bail en date du… j’ai loué à (locataire) un bien situé … dont il ne règle plus le loyer selon décompte ci-joint. Je demande…”
Et vous joignez toutes pièces justificatives, idéalement en double exemplaire (un jeu de pièces pour le tribunal, un jeu de pièces pour votre locataire (ou plus s’ils sont plusieurs, par exemple le garant, ou des colocataires etc.)
Attention, ici le juge apprécie souverainement la gravité de la faute et est libre de prononcer ou non la résiliation du bail. Argumentez efficacement votre demande !
Ici vous pouvez lire mon article simplissime sur les demandes à formuler devant le tribunal judiciaire pour obtenir une décision de justice efficace. En attendant, n’hésitez pas à consulter un professionnel du droit, commissaire de justice ou avocat.
Contrairement à la procédure accélérée au fond (référé), ici vous devez savoir qu’une conciliation sera tentée, et l’idéal est de l’avoir tentée avant de saisir le tribunal (demandez néanmoins confirmation au greffier sur la pratique du tribunal sur ce sujet).
Conseils concrets pour gagner du temps
donc de l’argent
Vous pouvez téléphoner au tribunal judiciaire pour connaître les prochaines dates d’audience. Il peut arriver que les dates d’audience au fond soient plus proches que les dates en procédure accélérée au fond lorsqu’on tient compte du délai de la clause résolutoire (un mois ou deux mois) et des délais de comparution (convocation devant être adressée au locataire 15 jours avant devant le tribunal judiciaire “au fond”, dans un “délai raisonnable” en procédure accélérée au fond (ancien référé)) et de conciliation préalable. Dans tous les cas (clause résolutoire ou non), vous avez le délai incompressible de six semaines de l’article 24 III de la loi du 6 juillet 1989 : l’assignation portée à la connaissance du représentant de l’Etat dans le département). Ainsi, même si votre bail contient une clause résolutoire, vous pouvez peut-être gagner du temps selon la procédure choisie. Renseignez-vous auprès du greffier ou d’un avocat.
Si votre locataire est en situation de surendettement ou menace de déposer un dossier, sachez que sa demande auprès de la Commission de surendettement n’a pas d’incidence sur la procédure de résiliation du bail. La décision de recevabilité à la procédure de surendettement n’a pas non plus de conséquence sur la résiliation. Cependant, l’article L. 331-3-2 du Code de la consommation prévoit la possibilité pour votre locataire de saisir le juge de l’exécution pour demander la suspension des mesures d’expulsion de son logement. Evidemment, la recevabilité au surendettement interdit toutes poursuites contre votre locataire, la dette de loyer est comme “gelée” et la Commission décidera si le locataire vous rembourse un montant défini sur une période choisie, ou s’il ne rembourse aucune dette pendant 24 mois, ou si les dettes sont tout bonnement effacées (y compris sa dette de loyer). Dans tous les cas, vous pourrez contester la décision de la Commission.
Et vous, quelles questions vous posez-vous ? Laissez un commentaire pour partager votre expérience !