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Un locataire qui ne paye pas ses loyers pendant près de deux ans, c’est possible ? Pourquoi ? C’est la question posée par Kelvin qui trouve cette situation vraiment injuste. Ma réponse va vous surprendre, on dépasse le droit bête et méchant !
Aujourd’hui, une fois n’est pas coutume, je réponds à une question d’un lecteur. Elle concerne le locataire.
J’avais ouvert pendant quelques jours la possibilité à mes lecteurs ou mon public sur YouTube de me poser des questions et c’est ce qu’a fait Kelvin. Il a saisi cette opportunité pour me poser la question sous la vidéo « Connaissez-vous le mec à 1 000 balles ? »
C’est un sujet qui l’a interpellé et on peut le comprendre !
La question :
« Bonjour Claire, merci pour cette vidéo. Pourrais-tu nous dire pourquoi la procédure d’expulsion d’un mauvais payeur peut prendre 2 ans ? C’est en effet étonnant de savoir qu’un propriétaire puisse payer 2 ans un crédit, alors que le locataire ne donne pas de nouvelles. La moindre des choses étant de discuter avec le propriétaire et non pas de faire le silence radio. En tout cas le reste est super bien expliqué. Merci à toi. »
Alors Kelvin, je ne vais pas pouvoir te donner une explication purement juridique…Justement ça fait partie des domaines dans le droit, ou des lois de manière générale, qui sont bien évidemment le fruit d’une politique, et qui résulte même d’une philosophie, d’une façon de voir les choses.
Donc en France, vous savez qu’il y a le droit au logement, que la dignité humaine est très importante dans toutes les procédures, notamment de contraintes, que ce soient les saisies par exemple, puisqu’il y a toujours un minimum qui est l’équivalent du RSA, qui est laissé sur le compte bancaire de la personne qui doit les sommes. Pour la saisie des rémunérations, c’est pareil. Je vous l’ai expliqué dans une autre vidéo, il y a toujours un minimum qui est laissé pour la personne. Et surtout si elle a plusieurs personnes à charge, le montant est plus important.
Pour la procédure d’expulsion, qui est une procédure dramatique si justement comme le dit Kelvin la personne garde le silence, pour l’expulsion il y a aussi ce côté « dignité humaine ».
Bien évidemment, le droit de propriété c’est un droit absolu, en tout cas dans la loi, dans la Constitution. Mais on se rend bien compte que quand il y a un litige de ce type avec des loyers impayés par exemple, le propriétaire ne peut que prendre son mal en patience… Il faut toujours voir les 2 côtés de la chose.
Le côté du locataire : des loyers impayés, mais pas seulement…
Donc Kelvin nous dit « Il faudrait quand même que la personne prévienne ».
Alors Kelvin a une très bonne éducation. Il peut remercier ses parents ! Après, ce n’est pas qu’une question d’éducation. Parfois les personnes qui sont dans les logements sont peut-être mal élevés, c’est possible, mais ce n’est pas vraiment ça la raison pour laquelle ils ne donnent pas suite aux relances du propriétaire. Souvent, ils ont honte. On ne s’en rend pas forcément compte quand on est du côté du propriétaire, mais c’est ce que j’ai pu voir en tant que clerc de commissaire de justice. C’est vrai que les personnes se murent dans le silence malheureusement parce qu’elles ont honte de la situation. Après on se dit « Est-ce qu’elle pourrait au moins libérer les lieux ? » Il faut aussi penser que parfois ce sont des personnes très seules qui finalement doivent faire face peut-être à une perte d’emploi, un accident dans leur vie professionnelle, voire un licenciement. Ils perdent des revenus, ils ont peut-être des personnes à charge, ils n’ont vraiment aucune connaissance pour les aider… Ça peut sembler fou mais encore une fois de mon expérience, c’est ce que j’ai pu identifier !
Ce n’est pas forcément des personnes de mauvaise foi, mais le silence et le fait qu’elles soient très seules les murent dans ce mutisme.
Tout cela pour dire que bien évidemment, une expulsion on ne la commence pas « comme ça ». Je vous ai indiqué dans cet article comment commencer cette procédure. J’en ai également parlé dans une interview avec Julien du blog https://www.immobilier-meuble.fr.
Sur les délais d’une procédure d’expulsion :
Première explication : délai pour obtenir une décision
On ne va pas commencer une procédure d’expulsion parce qu’un jour après l’échéance vous n’avez pas reçu le loyer. Donc on fait passer quelques jours. Ensuite, passe le temps de se rendre compte sur place de la situation. Si on n’arrive pas à avoir d’info sur la cause du retard, on transmet au commissaire de justice qui délivre les premiers actes. Après, il faut obtenir une décision de justice. Déjà, avec les délais qui sont ceux des parties, des avocats parfois qui demandent des renvois, ou les tribunaux qui sont trop encombrés, ou qui n’ont pas assez de personnels pour fonctionner, tout ça, selon les endroits, les villes où vous êtes, peut rajouter en délai.
Deuxième explication : des délais imposés par le législateur
Une fois que la décision de justice est obtenue, la loi a strictement réglementé des délais pour pouvoir justement non pas nuire au propriétaire, mais répondre à un « besoin impérieux supérieur », si on peut l’exprimer comme ça, qui est de protéger les citoyens, les locataires de manière générale. En fait, on ne veut pas avoir dans la rue des personnes au motif qu’à un moment donné elles n’ont pas les ressources financières nécessaires… Là on est sur la politique. Donc moi je ne fais pas de politique évidemment sur ce blog. Je peux vous expliquer des procédures, vous expliquer comment elles sont. La politique après relève du pouvoir du président, du député, du sénateur. D’ailleurs, si une loi vous pose problème, vous avez des représentants et vous devez les contacter, surtout si vous avez la moindre question ou si vous êtes mécontents d’une loi, c’est légitime en tant que citoyen. On a quand même le droit de dire ce qu’on pense ! On peut toujours écrire au député. D’ailleurs c’est ce que je disais quand les gens se plaignaient à l’Etude « Mais pourquoi c’est si long ? » Ecrivez au représentant.
Ceci étant dit, après avoir obtenu la décision de justice, il y a un recours ouvert à la personne, si le locataire n’est pas d’accord, le propriétaire aussi, avec la décision. Il y a un recours qui est l’appel, pendant 15 jours ou pendant 1 mois. Si la décision peut être exécutée tout de suite, on ne tient pas compte de ce délai.
Parfois la décision n’est pas exécutoire de suite donc il faut patienter. Et c’est seulement une fois qu’elle est définitive qu’on pourra l’exécuter.
Ensuite il y a différentes étapes de la procédure avec des délais qui sont imposés par la loi.
Ces délais-là servent à protéger la personne qui est considérée comme faible, à savoir le locataire. Après est-ce que c’est la réalité ou pas, ça, ça se discute, c’est politique, et je n’ai pas d’avis à donner là-dessus.
En tout cas pour protéger le locataire, la personne considérée comme faible aux yeux de la loi, une enquête sociale va être réalisée avant d’en arriver à ce drame qu’est l’expulsion. Selon les villes où j’ai travaillé, les personnes étaient convoquées au commissariat pour essayer de comprendre leur situation. Dans d’autres villes, il n’y avait pas du tout cette étape du commissariat. C’était directement les services de la ville ou des assistantes sociales qui prenaient contact avec le locataire en difficulté.
Photo Phong6698
Si vous voulez en savoir plus sur ces délais (je n’ai pas envie de vous remplir la tête parce que ce n’est pas le sujet vraiment), vous trouverez également sur mon blog un schéma récapitulatif des délais en matière d’expulsion.
Du côté du propriétaire : solutions efficaces en cas de loyers impayés
Qu’est-ce qu’un propriétaire peut faire quand il est face à cette situation difficile pour lui également ? Il ne faut pas l’oublier.
Premier conseil : se tourner vers la garantie loyers impayés.
Si, bien évidemment, le propriétaire y a souscrit.
Deuxième conseil : on a tous des protections juridiques dans nos contrats d’assurance.
On ne sait même pas qu’on paye tous les mois pour cela. Donc contactez votre assurance, que ce soit votre assurance propriétaire non occupant, votre assurance pour votre propre habitation. Peut-être que votre assurance peut prendre en charge tous les frais de la procédure. Certes vous y perdrez quand même, le loyer ne rentrant pas. Mais ça vous fera cette économie des frais de la procédure.
Troisième conseil : la suspension du prêt immobilier
Selon les cas, en tant que propriétaire, vous pouvez demander de suspendre le prêt immobilier pendant quelques mois. Ce n’est pas une situation qui pourra perdurer bien évidemment, mais ça peut peut-être vous permettre de vous retourner sur quelques semaines. Donc n’hésitez pas à contacter votre banque et voir s’ils peuvent faire quelque chose en ce sens.
Kelvin, je te remercie pour ta question qui nous a permis d’aborder un esprit même philosophique du droit. C’est très intéressant ! J’espère que vous aussi vous comprenez un petit peu mieux peut-être l’explication de ces longueurs de procédures.
Je vous rappelle que vous pouvez télécharger gratuitement sur mon blog mon ebook « Victime d’un impayé, la solution simple et efficace pour retrouver votre argent ».
On se retrouve demain pour une nouvelle vidéo de ce défi « 30 vidéos en 30 jours ». Merci d’avoir regardé cette vidéo. A bientôt !